Quelle réaction du public face à une imprimante 3D céramique ?

Rétrospective sur la 25e édition de la Fête de la poterie à Saint-Amand-en-Puisaye.

Le dernier week-end du mois de mai 2025, se tenait la Fête de la poterie de Saint-Amand-en-Puisaye. Ce village de grande tradition potière qui remonte au XIVème siècle, reconnu pour son grès, figure parmi les lieux emblématiques de la céramique française. Dans son histoire récente, Saint-Amand en Puisaye, grâce à l’association des Amis de la poterie Cadet-Gaubier, organise chaque année une fête de la poterie dans le parc du château du village durant laquelle de nombreux céramistes viennent exposer leurs dernières créations. C’est dans cette ambiance que la Camosine (la Caisse des monuments et des sites de la Nièvre), qui organise en cette période une exposition sur des céramistes contemporains dans le Musée du Grès situé dans le château, à eu l’idée de m’inviter pour animer la journée du samedi par une démonstration d’impression 3D céramique. Une démonstration qui serait aussi une comparaison avec la technique du tournage.

La démonstration

A mon arrivée dans cette charmante bourgade de Saint-Amand, Cyrille Gentet me réserva un chaleureux accueil et me présenta les lieux importants du village en regard de ce qui nous lie : la céramique. Car il faut savoir que Cyrille n’est pas n’importe qui. Il s’agit du vice-président de l’association qui organise le marché potier, un passionné de l’histoire de la céramique, et surtout un monstre de talent qui cumule plusieurs décennies d’expérience en tant que tourneur. Voilà le bonhomme avec qui j’allais partager la salle Mazarin du château pour faire ce qui avait été appelé une “battle”. Les objectifs de cette animation étaient variés. Présenter au public ce nouvel outil qu’est l’imprimante 3D céramique à travers son fonctionnement, le travail nécessaire à la production d’une pièce en amont de l’impression, pendant, et en aval, mais également ses contraintes et ses avantages. Les nombreux curieux venus voir ce qu’ils appellent la “machine” posèrent beaucoup de questions à l’humain qui la contrôle, et tous les sujets y passèrent : temps d’impression, modélisation, consistance de terre… Evidement, les propos étaient appuyés par des démonstrations d’impression. Pendant ce temps, Cyrille médusait l’autre partie de l’audience avec ses talents. En combinant nos deux approches, l’idée était de créer des pièces à quatre mains, mêlant tournage et impression, afin d’illustrer la complémentarité des deux techniques, bien loin donc d’une confrontation et d’une “battle”.

Les réactions

De manière assez prévisible, d’autant plus avec la dénomination de l’événement, une part du public y voyait le fameux duel de l’homme face à la “machine”.

Très vite les sceptiques s’apaisèrent en entendant les contraintes de géométries auxquelles je suis soumis, en observant que Cyrille avait tourné 5 bouteilles lorsque j’étais à la moitié de l’impression de ma première bouteille, en visualisant sur mon ordinateur le travail préparatoire que cela implique et en comprenant les étapes post-impression. En somme, les inquiétudes des gens disparaissent bien vite lorsqu’ils comprennent qu’il ne s’agit pas juste d’appuyer sur un bouton, que les choses ne se font pas toute seules, qu’elles ne sont pas automatiques, mais programmées, intentionnelles et soumises à des aléas. En parallèle, je remarquais l’émerveillement et les félicitations des enfants et des technophiles. De plus, je constatais un enthousiasme marqué de la part de nombreuses personnes qui avaient une sensibilité artistique ou un lien avec le monde du design devant les nouvelles possibilités créatives qui s’offrent à nous.

Mais qu’en pensent les céramistes dans tout ça ? C’est ce que certaines personnes posèrent comme question à mon ami. En un éclair, Cyrille partageait son approbation pour ce nouvel outil, défendant que le tour de potier avait de nombreux jours devant lui. S’appuyant sur son observation des presses qui sortirent 300 assiettes de l’heure à leur mise en service il y a quelques décennies déjà, mais qui pour autant n’ont pas “détruit” le métier de céramiste.

Déductions

D’après les organisateurs la fête, dans son ensemble, rencontra un franc succès, et mon intervention fut appréciée. Loin de confrontations et de duels, le contexte se prêtait à des discussions passionnantes. En fait, ce qui est assez amusant, c’est d’observer que les plus méfiants sont le plus souvent ceux qui ne sont pas du métier. Par exemple, quel plaisir d’avoir fait connaissance de Fabien, un céramiste qui a pour ambition de construire sa propre imprimante 3D céramique. De nombreux céramistes avec qui j’ai pu discuter, même au-delà de ceux rencontrés lors de cette fête, me témoignent leur enthousiasme pour ce nouvel outil. Il s’agit de l’enthousiasme de l’artiste et de l’explorateur. Et de manière générale, les réactions positives et encourageantes prévalent largement des attitudes pyrrhoniennes.

Augustin Filloux

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